Imaginez-vous perdu(e) au beau milieu d’un désert, en proie aux mirages que la fatigue et la soif nourrissent et au poids de longues semaines à marcher le long de dunes de sable qui s’étendent à perte de vue. La chaleur étouffante qui éreinte vos poumons et assèche l’entièreté de votre gorge vous pousse à croire que la fin est proche et inéluctable… Mais là, soudainement, à la mire de votre vision trouble, une forme se dessine… Miracle! Un cactus, trésor potentiel d’eau. Mais avant de courir à bras ouverts couvrir son corps épineux de baisers de gratitude, gardez une certaine réserve devant votre nouvel eldorado car si beaucoup d’anciens cinéastes prônaient les cactus comme l’option de survie éventuelle des grands aventuriers, aujourd’hui la science vous dira plutôt le contraire. 

Vraisemblablement, il est peut-être assez répandu déjà que le cactus, par ses composants toxiques internes, soit fortement déconseillé à l’ingestion mais a-t-on cherché à mieux comprendre le “comment”, le “pourquoi” et le “mais voyons, qu’en est-il des boissons commercialisés à l’eau de cactus”? Vous admettrez que la question mérite son explication claire et précise, et son petit lot de nuances.

Les cactus sont toxiques, fait indéniable. Plantes d’habitat aride, elles possèdent un métabolisme acide crassulacéen (photosynthèse de type CAM) dont la caractéristique spécifique est d’absorber le dioxyde de carbone la nuit. En procédant ainsi, elles protègent davantage leur chair spongieuse d’herbivores intrépides grâce aux acides et puissants alcaloïdes produits lors du processus. Ces substances chimiques sont cependant très âcres pour les hommes et donc difficilement tolérables. La faible approbation de nos estomacs se traduit par des vomissements, des diarrhées et des paralysies temporaires. Pas idéal comme conditions de survie, n’est ce pas? Voilà qui répond à la question d’origine par un non. Mais ce non n’est pas catégorique car comme dans toute chose, il existe des exceptions. 

Dans nos westerns préférés, le cactus typique que l’on retrouve est le saguaro. Malgré sa large représentation cinématographique, il ne vous sera sûrement d’aucune utilité en termes de survie dans le désert. Ses cousins par contre, le figuier de Barbarie et une espèce de cactus baril, le tonneau fishhook (Ferocactus wislizeni) le seront bien plus. La différence ne réside pas dans leur capacité de stockage de l’eau (sinon le saguaro gagnerait hautement la main en comparaison), mais sur la texture et la toxicité de leur chair. En dépit du fait qu’elle reste très désagréable à la consommation, la pulpe de ceux-ci regorge un liquide verdâtre à la concentration moindre en produits chimiques nuisibles. Chez le figuier de Barbarie, on coupera et pèlera le fruit, et chez le tonneau fishhook, directement le tissu. Encore faudrait-il les reconnaître dans le désert pour en faire usage, me diriez-vous. Chose relativement simple si l’on considère leurs caractéristiques morphologiques particulières : l’allure colorée aux extrémités des raquettes du figuier, et la forme cylindrique aux nervures verticales du baril.  

Le figuier de barbarie (Opuntia ficus-indica), ©Frankie Lopez

Les Amérindiens auraient utilisé ces cactus en tout connaissance de cause mais bien sûr seulement en dernier recours. Les Mexicains néanmoins semblent être plus férus de ces espèces à titre d’usage régulier : les figues de Barbarie sont appréciées là-bas et dégustées en cocktail, en tarte et comme légume. Le Ferocactus serait encore transformé en bonbons (dulce de bisnaga) bien que l’espèce de cactus couramment utilisée soit différente de celle abordée.  

Ferocactus wislizeni, ©The American Southwest

Il y aurait notamment quelques recherches en cours sur l’utilisation du cactus en tant que purificateur de l’eau contaminée par des métaux lourds ou des bactéries. Il semblerait en effet qu’en extrayant les parties intérieures gluantes du cactus, celui-ci puisse être exploité pour séparer l’eau.

Pour des questions de survie, il est finalement très incertain qu’un simple humain perdu de manière fortuite dans le désert comme nous, ne se retrouve pas plus desséché et malade en mangeant la chair d’un cactus. Mais cet article nous rappelle aussi qu’il n’y a pas de limites en matière de survie. Et peut-être vous aura-t-il donné l’envie de goûter aux piquantes spécialités mexicaines, si ce n’est pas déjà fait!

Sources:

  1. Segal, B., 2020. Can You Drink Water from a Cactus? Understanding the Dangers (bushcraftwild.com)
  2. Petruzzello, M. What’s the Difference Between Cane Sugar and Beet Sugar? | Britannica
  3. Comment boire l’eau d’un Cactus – ronalpenford.com
  4. Est-il sécuritaire de boire de l’eau d’un cactus? Aliments (ofcafe.com)
  5. Jones, D. Can Humans Drink the Water Out of a Cactus? (goneoutdoors.com)

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