En 1975, un étrange dossier policier a suscité la curiosité : « les empreintes de plusieurs chimpanzés ont été prélevées à la suite d’une descente policière aux zoos de Londres et de Twycross en Angleterre, au cours d’une période marquée par une forte hausse de crimes non résolus, pour essayer de mettre la main sur des coupables insoupçonnés ». A la suite de cette opération policière, effectuée par des experts en dactylogramme, il a été conclu que « les empreintes de singes ressemblent très exactement aux nôtres ».
Ce fait divers reporté par The Independant souligne le partage inusité de ce trait, et les singes ne sont pas les seuls. Dans le cas des primates, le concept de l’évolution place l’être humain comme leur proche cousin, ce qui contribue à expliquer la ressemblance des empreintes digitales. Cependant, lorsque l’on mentionne le fait que les koalas ont également des empreintes très similaires aux nôtres, on obtient des haussements de sourcil. Pourtant, c’est bien le cas! Il est ici plus difficile de concevoir une raison pour cette similarité, puisque le koala et l’Homme ne sont pas de proches parents.
Quelle est alors l’explication à cette énigme? Les chercheurs s’entendent pour dire qu’il s’agit d’une convergence évolutive, c’est-à-dire une caractéristique similaire qui est apparue de manière indépendante chez deux espèces distantes phylogénétiquement. Un autre exemple de ce type d’homoplasie est la similitude de la structure de l’œil de la pieuvre avec celle de l’œil humain.
Bien que l’apparition de la caractéristique demeure indépendante, puisque les proches parents des koalas ne la possèdent pas, elle n’est pas hasardeuse. Sa présence au bout de nos doigts peut s’expliquer par le contexte environnemental des ancêtres de chaque espèce, qui les a obligées à développer l’aptitude à s’adapter pour survivre. Dans le cas de l’être humain, du chimpanzé et du koala, cette adaptation s’avère être la capacité à grimper, à s’agripper ou à tenir un objet. Les empreintes remplissent deux fonctions : une meilleure poigne et une sensibilité accrue aux textures et aux formes. Les koalas sont très pointilleux concernant la sélection de leurs feuilles d’eucalyptus, mangeant seulement des plantes âgées d’un certain âge. Cette préférence les a entraînés à développer un excellent sens du toucher, nécessaire pour différencier les feuilles dans leur milieu, et sélectionner la nourriture répondant à leurs besoins alimentaires.
Faut-il se méfier des koalas, alors ? Non, ce n’est pas la morale de l’histoire ; mais en Australie, les empreintes d’un koala pourraient être trouvées inopinément sur une scène de crime, et rendre alors l’identification des suspects bien plus compliquée…
Sources:
- Burrell, I. (1996, décembre 7). Koalas make a monkey out of the police. The Independent.
- Caroline, J., Gross, M. S., & Spillman, D. M. (2003). Fiber digestion in mammals. Pak. J. Biol. Sci, 6(17), 1564-73. Repéré à l’URL: http://www.docsdrive.com/pdfs/ansinet/pjbs/2003/1564-1573.pdf
- Currie, A. (2013). Convergence as Evidence. The British Journal for the Philosophy of Science, 64(4), 763‑786. https://doi.org/10.1093/bjps/axs027
- Henneberg, M., Lambert, K. M., & Leigh, C. M. (1998). FINGERPRINTING A CHIMPANZEE AND A KOALA: ANIMAL DERMATOGLYPHICS CAN RESEMBLE HUMAN ONES. In Proceedings of the Conference of the Australian and New Zealand International Symposium on the Forensic Sciences 1996