Platon, le poète généticien

Chroniques des Vérités relatives et absolues biologiques - par Mlle Stan

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1903

Existe-t-il un lien entre la philosophie et la biologie autre que le fait que ces deux mots riment?

Étudier le vivant et aimer la sagesse. Pratiquer les deux ne mène-t-il pas indéniablement à aimer le vivant et, conséquemment, à vivre plus sagement par son étude approfondie? Pour les deux, il suffit de commencer comme d’habitude par trouver une question à se poser, donner un rendez-vous à la curiosité pour rencontrer finalement l’idée qui mènera sûrement à une découverte passionnante…

…ou une douleur de tête éprouvante.

Génétiquement parlant, dans un livre du cours d’introduction à la génétique, nous pouvons déceler une information assez intéressante concernant le soma et le germen… Tout être vivant est formé d’une partie nommée soma et d’une autre nommée germen. Le germen correspond aux cellules reproductrices germinales. C’est la partie invisible, le génome, le bagage génétique que l’être vivant porte dans des gamètes pouvant être transmises par hérédité. Le soma, quant à lui, est l’ensemble des cellules somatiques qui ne peuvent guère reformer un individu entier par la reproduction, mais qui constituent l’ensemble d’un individu. C’est la partie visible, le génotype qui est traduit en phénotype (puisque le phénotype dépend du germen), partie qui nous permet de comprendre l’expressivité du caractère et des gènes. Friedrich Leopold August Weismann, un scientifique d’antan qui était aussi « wise » que l’indique son nom, a spécifié que le germen est la section qui est transmise de génération en génération alors que l’autre, le soma, est voué à la disparition à chaque génération et n’est pas transmis aux descendants. Tout changement effectué sur le soma est perdu à la nouvelle génération alors que tout changement gravé dans le germen est gardé pour la nouvelle génération qui en sera dotée.

Philosophiquement parlant, Platon a déclaré que l’être qui semble former un tout, dans la réalité qu’est la nôtre, est constitué en vérité de deux entités distinctes par leurs caractéristiques opposées. En paraphrasant pour que le commun des mortels comprenne le concept : l’humain est fait d’un corps et d’une âme. Le corps est visible, mortel et imparfait. L’âme est invisible, éternelle et parfaite. Même s’ils sont contradictoires, le corps et l’âme sont en colocations dans l’être durant la durée de sa vie et sont séparés au moment ultime, à la mort. Mais il y a un hic : alors que le corps se retrouve à la rue, l’âme, elle, déménage. Lors du décès, les deux substances sont séparées : le corps disparaît et devient poussière alors que l’âme (différenciée du corps par un travail d’introspection continu visant son amélioration) survivra et continuera d’exister.

Arrivé à ce stade de connaissance de deux domaines apparemment très éloignés, il est possible de constater un lien, une ressemblance très étrange. Certains termes définissant des choses qui ne semblent apparemment pas reliées ont toutefois des caractéristiques communes. Il ne faut pas oublier que la science essaye de comprendre l’incompréhensible et qu’elle est semblable à la philosophie prônant une sagesse, sinon du moins une tentative de sagesse.

Voici l’hypothèse : et si Platon avait été, sans s’en rendre compte, un généticien frôlant la poésie?

Et si, lorsqu’il parlait d’âme, cela faisait référence au germen et le corps, au soma?

Toutefois, pour que l’hypothèse tienne la route, il faut interchanger l’utilisation de la caractéristique « parfaite », par « sujet au perfectionnement ».

Ainsi, le corps, comme le soma, sont tous les deux la partie visible, puisqu’ils sont le phénotype, la traduction du message porté par le germen. Ce dernier correspondrait à l’âme qui, dans un cas idéal, est celui qui dicte et influence le corps et non l’inverse. Le corps, comme le soma, est temporaire et porte, le temps d’une vie, tout ce qui est plus important, soit l’âme ou les gamètes.

À la fin, on réalise que le but de la vie de l’individu était de sauver son âme par la connaissance. Le but connexe de la biologie n’est-il pas alors de sauver son bagage génétique par la transmission de ses gènes d’une génération à l’autre? N’est-ce pas, dans un cas comme dans l’autre, une manière possible de surpasser la mort même, par la descendance, forme de transcendance? En effet, le bagage génétique, transmis de génération en génération, est une substance qui n’a jamais, depuis l’apparition de la vie, été sujette à la disparition, sauf dans le cas d’un manque de reproduction, d’une disparition, d’un « cul-de-sac » évolutif. Chaque être est le spécimen portant le futur possible d’une continuation sur un plan biologique métaphysique.

La mort, alors, n’existe que pour le corps, le soma, alors que la vie, le génome gamétique, a continuellement échappé à la destruction par la descendance. Aussi, cette matière, tel une âme qui anime chaque être et lui donne la possibilité de vivre, est véritablement invisible par sa taille microscopique, immortelle et sujette à un perfectionnement continu grâce au travail incessant de l’évolution. Par tous ces essais-erreurs de la génétique appelés mutations, le génome évolue, l’âme se cherche et d’enfant à enfant, se modifie, se multiplie et continue son chemin de corps en corps jusqu’à donner une diversité des âmes présente partout sur Terre. En poussant plus loin, non seulement ce génome est le même dans le temps (le génome d’aujourd’hui n’est qu’une version améliorée et révisée depuis le début de la formation de l’ADN) mais dans l’espace (tous les êtres partagent des gènes en commun, formant ainsi un ensemble existant et vivant de fragments de génomes éparpillés partout sur la surface du globe au même moment). L’âme est unique pour chacun et commune à tous. Antoine Laurent Lavoisier confirmerait ces dires par un très connu, mais jamais trop cité « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». L’âme ne semble pas seulement éternelle, mais elle est tout autant omniprésente et partagée par tous les êtres vivants, évoluée et transformée sans jamais s’arrêter.

Il y a là l’explication du but ultime de la biologie et de la philosophie en commun. C’est par l’Amour que l’évolution du génome peut avoir lieu. Déjouant la mort corporelle en transmettant un génome immortel et omniprésent dans l’espace comme dans le temps, c’est véritablement la plus grande des forces existantes.

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