Eugenie Clark (1922-2015)
“I never let being a woman — even as a young girl — stop me from trying to do something I really wanted to do, especially if it concerned fishes or the underwater world,” – Eugenie Clark, 2009.
Eugenie Clark, née le 4 mai 1922 d’une mère japonaise et d’un père américain, qui décéda peu de temps après sa naissance, fut une grande femme pour l’implication du genre féminin dans le domaine de la science. Toute petite, elle était déjà passionnée par le monde sous l’océan qu’elle découvrit grâce à l’aquarium Battery Park à New York. Elle y passait des heures, nez collé dans la vitre de l’aquarium des requins, à s’imaginer nager dans l’océan, entourée de créatures marines merveilleuses et mystérieuses. Dès l’enfance, elle apprit tout ce qu’elle pouvait sur les espèces marines en s’éduquant à l’aquarium.
Par la suite, elle gradua du collège Hunter à Manhattan, en 1942. Puis, elle travailla dans une compagnie de plastique de 1942 à 1946 étant donné le peu d’emplois disponibles, à ce moment, en océanographie à cause de la deuxième guerre mondiale. Refusée à Columbia University, car elle est une femme, Eugenie entreprit une maitrise en zoologie à l’Université de New York, où elle se spécialisa sur les poissons-globes et gradua en 1946.
Ensuite, elle entreprit son doctorat sur le xipho et le platy, deux espèces de poissons tropicaux d’eau douce, et le termina en 1950. Puis, elle travailla comme assistante pour Carl L. Hubbs à l’institut d’océanographie Scripps, où elle apprit tout sur la plongée sous-marine. Par contre, la politique de l’institut empêchait les femmes de participer aux voyages se déroulant la nuit, en haute mer et aux îles Galápagos. Clark avoue qu’elle a souvent dû faire ses preuves pour montrer qu’elle pouvait fonctionner au rythme des hommes. Par exemple, elle a participé à une plongée sous grotte pour observer des requins qui «dormaient», phénomène qu’elle étudiera plus tard dans sa carrière.
En même temps d’effectuer son doctorat, elle a travaillé au Musée de l’histoire Naturelle à New York. Elle eut quatre enfants de son deuxième mari. Tout en bâtissant une famille, elle publia, en 1953, sa première autobiographie nommée «Lady with a Spear» qui expliquait ses recherches effectuées dans le sud de l’océan Pacifique. Cette autobiographie fut traduite en plusieurs langues et fut très populaire auprès des femmes, car Clark y explique comment elle a réussi à percer en science dans un monde d’hommes. La famille Vanderbilt fut tellement impressionnée par le travail et l’autobiographie de Madame Clark qu’elle lui suggéra de financer la construction d’un laboratoire et d’une station de recherche en Floride. Clark deviendra la fondatrice et directrice exécutive du Cape Haze Marine Laboratory qui avait comme objectif l’acquisition et l’entretien des requins pour les visites scientifiques, ainsi que la recherche sur ceux-ci. Avec l’aide de son assistant Beryl Chadwick, Clark réussit à trouver plusieurs requins pour commencer ses expériences scientifiques. Puis, avec l’ampleur que prenait la station de recherche, Clark et son assistant déménagèrent pour s’installer dans un nouveau laboratoire ouvert au public, nommé The Mote Marine Laboratory. À ce moment, Eugenie Clark n’avait que 33 ans. Le succès du laboratoire et la rareté d’une femme dans le milieu de la biologie marine lui ont valu le surnom de «Shark Lady» et ce, même avant qu’elle exerce des expériences sur ce grand poisson.
Clark, dans ses expériences avec les requins, a voulu prouver que les stéréotypes sur ceux-ci, dont leur manque d’intelligence, étaient faux et qu’ils n’étaient pas seulement des machines à manger. Elle a étudié le comportement étrange des requins qui semblaient dormir dans les grottes sur les côtes du Mexique. Recherche très importante, car à cette époque, on croyait que pour respirer, les requins devaient absolument être en mouvement. Elle en conclue que ces requins se retrouvaient en suspension dans les grottes souterraines, car ces eaux contenaient une moins grande quantité de parasites.
Aussi, le phénomène de Jaws a beaucoup influencé la carrière de Dr. Clark. Elle a souvent été questionnée sur le comportement des requins et elle contestait la mauvaise image créée par les livres et les films Jaws. En désaccord avec ce phénomène, elle a même invité Peter Benchley, écrivain du livre Les dents de la mer, à plonger avec elle, pour lui démontrer à quel point il avait sali la réputation des requins. Puis, en 1968, elle a accepté un poste d’enseignante à l’Université du Maryland. En 1969, elle publie sa deuxième autobiographie : The Lady and the Shark. Tout en enseignant, elle s’est impliquée dans la préservation de l’environnement marin. Elle reçue plusieurs prix et médailles dont la médaille d’or de la société des femmes géographes et le Stoneman Envrionmental Award pour sa contribution à la préservation du milieu marin. Elle publia plus de 175 articles, dont 12 dans le National Geographic, trois livres (2 autobiographies et un livre pour enfant) et elle réalisa un film. Elle dirigea plus de 200 expéditions de recherche à travers le monde et elle trouva une nouvelle espèce de poisson fouisseur : Trichonotus nikii.
Une de ses plus grands accomplissements a été la découverte de Serranus subligarius qui peut changer de sexe de femelle à mâle et vice versa, en moins de 10 secondes. Elle a aussi découvert un requin possédant six branchies au lieu de, normalement, cinq. Elle a même été invitée à bord du Calypso pour faire de la voile en compagnie de Jacques Cousteau. Elle résume son image de cet homme par : « His wife was the one in control behind the scenes. »
En 1999, elle prit sa retraite, mais continua d’enseigner un cours par semestre. Puis, à l’âge de 92 ans, Dr. Clark effectua sa dernière plongée et publia son dernier article sur les sites de nidification et le comportement du Canthidermis maculata, en février 2015. Malheureusement, elle décéda le 25 février 2015 d’un cancer des poumons.
Laissant sa marque dans le monde de la biologie marine, Eugenie Clark n’a pas que travaillé auprès des requins, mais a aussi amélioré leur réputation et elle a sans aucun doute contesté ardemment, tout au long de sa vie, les stéréotypes sur les femmes dans la communauté scientifique. Sans plusieurs femmes comme Eugenie Clark, la femme n’aurait certainement pas la place qui lui revient, à ce jour, dans le domaine scientifique. Dr. Clark ne part pas sans laisser sa trace, grâce à elle, le Mote Marine Laboratory accueille 24 programmes marins de recherche et de conservation (aquaculture, restauration des récifs coralliens), des programmes d’éducation, ainsi qu’un grand aquarium ouvert au public.
“Sharks are among the most perfectly constructed creatures in nature. Some forms have survived for 200 million years.” Dr. Clark
Pour plus d’informations : https://www.youtube.com/watch?v=8WIe9FUMYwk
Références
Huggins, A. (2015). Archives of Maryland-Eugenie Clark, Ph.D. (1922-2015). Repéré à http://msa.maryland.gov/megafile/msa/speccol/sc3500/sc3520/013500/013574/html/13574bio.html
Mcfadden, R. (March 02, 2015).
Marine biologist Eugenie Clark saw beauty in sharks. Repéré à http://m.theglobeandmail.com/technology/science/marine-biologist-eugenie-clark-saw-beauty-in-sharks/article23256078/?service=mobile
Morton, B. The Shark Lady: Dr. Eugenie Clark Reflects on a Lifetime of Fish Study. Repéré à http://www.sportdiver.com/article/news/shark-lady-dr-eugenie-clark-reflects-lifetime-fish-study
Rutger, H. (March5, 2015). Remembering mote’s “Shark Lady”: The life and legacy of Dr.Eugenie Clark. Repéré à https://mote.org/news/article/remembering-the-shark-lady-the-life-and-legacy-of-dr.-eugenie-clark
Scales, H. Eugenie Clark: Meeting the Shark Lady. Repéré à http://findingada.com/book/eugenie-clark-meeting-the-shark-lady/
Cover photo courtesy of Mote Marine Laboratory